(Chronique parue dans La Gazette de Montpellier le 14 septembre 2017)
La façon dont nous écoutons influence jusqu'à ce qui est dit, façonnant par là la qualité de nos relations aux autres.
Ainsi, lorsque j'ai plusieurs idées à exposer, je vais moduler ma façon de les exprimer, voire les sélectionner en fonction de l'écoute que je rencontre.
Dans l'autre sens, si je suis en prise avec la colère et que je reçois les signes d'une réelle écoute, je vais probablement nuancer l'intensité de mon expression, car je n'aurai plus besoin de charger un mur, mais simplement de franchir une porte.
Des médiateurs de paix auprès de chefs politiques témoignent de l'impact concret de leur qualité d'écoute sur ce qui se joue dans le processus.
Et si je suis passionnée par mon sujet et animée d'un désir de le partager, la qualité de présence de mon interlocuteur va soutenir ou influencer à la baisse l'inspiration et l'enthousiasme.
Nous n'aurons pas, encore, la même ouverture à entendre face à quelqu'un qui veut nous vendre quelque chose et un conférencier heureux d'enrichir les regards sur la vie.
"La plupart des gens n'écoutent pas avec l'intention d'écouter, mais celle de répondre" dit Stephen Covey.
Dans le monde occidental actuel, nous pouvons, en moyenne par minute, exprimer entre 100 et 200 mots, écouter entre 400 et 600 mots, et avoir entre 1 et 3000 mots en pensées. L'on voit ainsi notre plus grande capacité à écouter qu'à dire, et le potentiel conséquent de cacophonie interne des pensées au moment où l'autre nous parle.
Sans compter sur les moyens techniques (écriture, enregistrement numérique…) dont nous disposons pour sauvegarder les messages, différer leur réception, et qui nous affranchissent possiblement de cette pleine présence.
Nous avons une palette de combinaisons pour choisir de créer (ou pas) les conditions d'une communication véritable.
Le caractère chinois pour écrire "écouter" est constitué de plusieurs parties qui signifient "oreille", mais aussi "vous", "yeux", "cœur" et "attention non divisée".
Cela laisse imaginer un vécu très différent lors d'une écoute qui implique non seulement nos oreilles, mais l'ensemble de notre être.
La communication non violente de Marshall Rosenberg nous parle aussi de cet élan à "déballer des cadeaux" lorsque l'on écoute pleinement et authentiquement pour rencontrer le message de l'autre au-delà des mots, même agressifs par exemple.
Une belle opportunité de nous "regarder dans notre écoute" !