Chronique parue dans La Gazette de Montpellier en mars 2016
Dans notre démocratie actuelle, au moment des élections, il y a des candidats. Et il y a donc des perdants.
Comment gouverner ensuite alors qu'une partie du groupe chicane pour appliquer les décisions prises ?
Le modèle autocratique (le pouvoir aux mains d'une minorité) est, quant à lui, encore très présent.
Or, nos organisations et notre société ne sont plus gouvernables suivant ces deux modèles, car elles sont devenues trop complexes, trop hétérogènes, trop individualistes, trop éduquées.
Une alternative existe, développée dans les années 60 en Hollande par G. Endenburg, à partir de la cybernétique et la théorie des systèmes, et baptisée "sociocratie" (emprunt à Auguste Comte, montpelliérain !).
L'élection sans candidat, composante de la sociocratie, est utilisée par des organisations de plus en plus nombreuses. Elle est notamment inscrite dans les statuts de l'association Colibris, et pratiquée dans tous les cercles qui la composent.
Sous cette appellation surprenante se déploie un processus qui inclut les atouts de notre mode habituel, et les enrichit de plusieurs occasions d'écouter la sagesse individuelle et collective.
Les étapes ?
- Le rôle à remplir et les compétences et savoir-être souhaités sont formulés clairement.
- Chaque participant indique sur un papier son vote et son nom "moi x, je vote pour y".
Il est possible de voter pour soi-même. L'occasion de distinguer l'élan de l'ego et le don au bien commun. Là où la démocratie est majoritairement à bulletin secret, et l'autocratie à expert autoproclamé.
L'occasion également de formuler les qualités que l'on reconnaît à l'autre, qui ne les voyait peut-être pas.
- L'animateur de l'élection invite chacun à expliquer à voix haute les raisons de son choix.
- A l'issue de ce tour d'expression, enrichi par l'écoute, chacun peut éventuellement modifier son vote.
- Au vu de la justesse collective et du nombre de voix, l'un des participants fait une proposition.
- La proposition est alors soumise à un tour d'objection.
Là où la démocratie tranche au vu du score numérique, formant le clivage entre gagnants et perdants.
Une objection n'est pas une préférence, ni une obstruction. Elle met en avant un risque objectif pour l'organisation. Elle n'est pas dirigée personnellement contre quelqu'un, Elle est un cadeau. Elle s'accompagne d'une explication et, autant que possible, d'une proposition de nature à la lever.
De plus, chacun-e est souverain-e, pour vérifier son alignement au regard des critères requis.
- Un grand nombre d'objections véritables peut pousser l'animateur à appeler une autre proposition.
- Objection : le groupe s'attache à essayer de lever l'objection. Lorsque l'objection est levée, l'on passe à la dernière étape. Si elle est maintenue, l'animateur appelle une autre proposition.
- Pas d'objection : la personne proposée indique enfin si elle accepte le rôle. Magnifique situation d'humilité : "après ce processus, suis-je cohérent avec moi-même si j'accepte ce rôle ?" Et si elle accepte, c'est le moment de célébrer ce choix réellement collectif.
Le processus peut être pratiqué à distance (avec une animation pour garder la clarté sur les étapes). Ou encore combinée avec un tirage au sort, répétée en cercles successifs.
Mieux vaut peut-être s'exercer d'abord sur "qui cuisinera ce soir"… afin de cultiver la fluidité et l'enthousiasme, et les emporter au coeur nos collectivités !
Le meilleur gouvernement est celui qui nous enseigne à nous gouverner nous-même. (Goethe).
Chronique parue dans La Gazette de Montpellier en mars 2016
Dans notre démocratie actuelle, au moment des élections, il y a des candidats. Et il y a donc des perdants.
Comment gouverner ensuite alors qu'une partie du groupe chicane pour appliquer les décisions prises ?