(Chronique parue dans La Gazette de Montpellier en avril 2016)
Depuis plus de 2000 ans, nos sociétés occidentales sont gouvernées par des valeurs dites "masculines".
Compétition, domination, hégémonie, pulsion de vengeance, répétition de schémas avec les mêmes conséquences nuisibles au vivant, conduisent à la division et à la violence, visible et moins visible.
Les peurs croissantes et multiples (de perte d'identité, de manque, de la mort, par exemple) nous font nous accrocher à un fonctionnement archaïque, notre cerveau reptilien prenant bien souvent le contrôle afin de parer à l'urgence supposée.
Le reptilien, c'est celui qui fuit ou qui attaque, sans nuance, sans évolution.
Vouloir en sortir a pu nous faire résumer la situation à une question de genre (l'homme ferait suivant les valeurs masculines décrites plus haut, la femme ferait suivant les valeurs dites féminines), qui continue pourtant de séparer, d'opposer, de créer des cloisons par lesquelles la vie ne peut davantage se déployer.
Il s'agit de dépasser ces appellations abusives de "valeurs féminines", de "féministe".
Retrouver nos rythmes justes, identifier et sortir des rôles que nous endossons dans nos cercles, intimes, professionnels, politiques (celui de la personne "efficace", "toujours disponible", "toujours en forme", "toujours…", "un chef d'entreprise se doit se…", "il faut que je…", "on reconnaît ma valeur si je fais ceci ou cela, de façon conditionné à ce que je fais").
Il est surtout urgent de réconcilier, de restaurer, de rééquilibrer, en chacun de nous, femmes et hommes, ces qualités disponibles de patience, d'observation, d'écoute fine, de tendresse, de coopération, de recherche de solutions de paix. De mobiliser notre capacité de réponses créatrices et libres, qui tirent les leçons de l'expérience vivante, et permettent la médiation, la communication non violente.
C'est un chantier qui demande des outils et du travail, qui n'est pas encore un réflexe bien confortable.
Et c'est le défi que nous sommes libres et responsables de relever ou non, individuellement, afin que se répercute dans toutes nos organisations une nouvelle conscience de la relation à nous-même, complexe et universelle.
Gandhi, notamment, a inspiré des manifestations concrètes de ce respect de nos richesses (voir en Inde les expériences de communautés vivant en autosuffisance alimentaires et énergétique, les micro entreprises respectueuses de l'environnement, la valorisation de l'intériorité au cœur d'un esprit de coopération et de don).
Ce changement de paradigme fait partie de l'ADN du mouvement Colibris, qui sort résolument d'une posture de militantisme (je crois entendre un garde armé debout, prêt à tirer) pour cheminer vers cette confiance dans le potentiel de l'être humain à transformer, créer et relier, pour (re)prendre sa place juste dans la symphonie de l'univers.